Les tout premiers foils recyclables entrent dans la course

Les tout premiers foils recyclables entrent dans la course C’est une première : un voilier équipé de foils recyclables participe à une course transatlantique. Et derrière cette innovation, on retrouve des chercheurs et ingénieurs de l’Université Bretagne Sud.

Le 21 septembre, 90 bateaux ont quitté les Sables d’Olonne pour traverser l’Atlantique. Destination : la Guadeloupe, après une escale aux Canaries. C’est la Mini-transat 2025. Et à l’UBS, nos yeux seront rivés sur un bateau en particulier : Minilab, le voilier laboratoire du skipper Adrien Marchandise.

Sa singularité ? Une paire de foils sur ses flancs. Déjà rares sur ces petits bateaux de 6,50 mètres à peine, les foils de Minilab ont aussi une spécificité inédite : ils sont recyclables. Une avancée technologique rendue possible grâce aux travaux de recherche et d’innovation des chercheurs et des ingénieurs de l’UBS.

Alléger le bilan carbone de la course au large

Les foils sont devenus incontournables dans la course au large. Ces ailes marines permettent aux voiliers de décoller au-dessus de l’eau et d’atteindre des vitesses record. Mais leur conception et leur fabrication pèsent lourd dans le bilan carbone des bateaux. Et ils ont une fâcheuse tendance à être rapidement obsolètes, quand ils ne brisent pas tout simplement sous la folle contrainte à laquelle ils sont soumis.

 

 

Jusqu’ici, une seule issue pour les foils en fin de vie : l’incinération. En cause, les matériaux composites thermodurcissables. Une fois cuits, fibre et résine qui les composent deviennent indissociables. Pas de recyclage possible. Adrien Marchandise, par ailleurs co-fondateur et directeur technologique de l’entreprise Avel Robotics, a donc voulu explorer une autre voie, celle des composites thermoplastiques. Leur atout : On peut les fondre. « Comme le chocolat » résume simplement Adrien Marchandise. Et alors fibre et résine se séparent et peuvent être réemployées.

Pour développer cette solution, il a naturellement frappé à la porte de l’UBS, où chercheurs et ingénieurs ont développé une véritable expertise des matériaux thermoplastiques et des matériaux innovants.

Dans les labos de l’UBS

À ComposiTIC, le plateau technique de l’université à Lorient, on mise depuis longtemps sur ces composites innovants. « Non seulement ils sont recyclables, mais ils présentent une bonne résistance aux chocs et à l’eau, c’est idéal pour l’industrie nautique » explique Cyran Le Guennec, chef de projet à ComposiTIC.

Alors imaginer un foil en composites thermoplastiques ? Les équipes ont répondu présent ! Première étape pour Cyran Le Guennec et une équipe de 6 ingénieurs de ComposiTIC, d’Ubside et d’experts de l’Institut de Recherche Dupuy de Lôme (IRDL) : identifier le meilleur matériau. « Nous avons testé plusieurs solutions, soumis les échantillons à toutes sortes d’essais de résistance et de raideur, puis analysé les résultats », détaille Cyran Le Guennec. À cette étape, le regard des experts est précieux. « Grâce aux années de recherche menée dans les labos de l’UBS, on a été capable de caractériser avec rigueur la qualité du matériau. »

 

 

Une fois le matériau choisi, place au drapage des lattes du foil. Les ingénieurs se sont concentrés sur une zone critique du foil : le barreau, qui constitue en quelque sorte sa colonne vertébrale. Formes, assemblages, structures… plusieurs combinaisons ont été expérimentées avant de retenir la plus efficace. La finalisation de la fabrication a ensuite été réalisée chez Avel Robotics, avant que le foil ne revienne… dans les laboratoires de l’IRDL, à l’UBS pour les tests mécaniques.

Bourré de capteurs, le foil est passé entre les mâchoires impitoyables de la machine de traction la plate-forme d’essais vibratoires de l’IRDL. « Nous avons adapté les protocoles utilisés dans le secteur de l’aéronautique » précise Cyran Le Guennec. Traduction : les ingénieurs ont tiré dessus très fort. Et bonne nouvelle, « les résultats de ces tests correspondent à ce que nous avions anticipé dans nos calculs de résistance et de vibration, signe d’une fabrication de qualité. » Ils serviront donc de référence pour le suivi en mer et, dans quelques semaines, à l’analyse du foil après sa traversée.

Une coopération de longue date

La collaboration entre ComposiTIC et Adrien Marchandise ne date pas d’hier. De 2016 à 2020, ce dernier menait sa thèse… à l’UBS, sous la co-direction de Vincent Keryvin, enseignant-chercheur et co-responsable du Master Ingénierie Marine et Yves Grohens, directeur de ComposiTIC. « J’ai étudié le comportement des matériaux et l'impact des procédés de fabrication sur les performances mécaniques critiques des hydrofoils. »

Sa thèse a évolué vers la création de l'entreprise Avel Robotics, un chantier de fabrication de pièces composites utilisant des outils de fabrication additive. « J’ai toujours un pied dans la recherche et un pied dans l’industrie » résume Adrien Marchandise. « ComposiTIC est un outil incroyable pour rendre accessible un travail de recherche à des industriels » ajoute-t-il.

Cyran Le Guennec, de son côté, ne cache pas son enthousiasme pour ce projet : « pour la recherche et l’innovation, la course au large est un terrain de jeu idéal. C’est un secteur qui teste et qui ose. Le cycle de l’innovation y est très court, on passe vite à la mise en pratique. Résultat : c’est un laboratoire grandeur nature, et les avancées dans ce secteur peuvent être utiles à d’autres industries. »

 

Ce projet a été soutenu par les instituts Carnot Arts et Carnot Mica, l’IRDL et l’UBS.

Il est également le fruit de la collaboration entre des acteurs issus du monde de la recherche et de l’industrie : ComposiTIC, Ubside, Avel Robotics, Pixel sur Mer, SMM Composites, Diab (Suède) et Victrex (Royaume-Uni).

 

 

Crédits photographiques : ©Université Bretagne Sud. Service Communication