Math et voile : une action originale proposée aux lycées en lien avec l'UBS

Math et voile : une action originale proposée aux lycées en lien avec l'UBSMardi 25 octobre 2022, Sylvain Barré, enseignant de mathématiques à l'Université Bretagne Sud et membre du laboratoire de Mathématiques de Bretagne Atlantique (LMBA), est allé à la rencontre de deux groupes de 6 élèves de première qui expérimentaient une aventure : math et navigation.

Cette rencontre a eu lieu dans le cadre du projet  Trousse à projets initié par le lycée Emile Zola de Rennes. Sylvain Barré est resté à bord avec eux toute la journée, il nous raconte son expérience. "Initiation à la voile sur bateau habitable et soutien scolaire en mathématiques à bord pour des élèves de classe de Première, je crois que ces actions sont très intéressantes : faire des maths ailleurs que dans une salle de cours est porteur car on associe à la discipline des lieux ou moments souvent synonyme de plaisir, d'amusement.... " s’enthousiasme t-il.

Voiles et Maths : croisière et soutien scolaire !

"Nous étions 9 : 6 élèves dont 4 filles et 2 garçons, le capitaine (professeur de mathématiques des élèves) Samuel Coupey, la professeur de sport et moi-même. D'abord, c'est le premier groupe qui a présenté son parcours : départ en train Rennes-Vannes, puis Bus pour Le Crouesty pour rejoindre le bateau. Ensuite, départ pour Belle-île... Quiberon, Vannes. Ils m'ont parlé aussi des maths qu'ils ont fait à bord, des petits programmes Python sur calculette, pour trouver des valeurs de suites récurrentes... Ensuite, je leur ai fait un long exposé à rebondissements en fonctions de leurs questions en partant de la théorie des nœud * (tracés sur des surfaces...) avec des détours par de multiples choses. Il y en a eu beaucoup sur la recherche en math, le fonctionnement de la Faculté des Sciences (NDLR : Sylvain Barré enseigne à la faculté Sciences & Sciences de l'Ingénieur à Vannes, à l'Université Bretagne Sud). Nous avons mangé ensemble après avoir tout cuisiné à bord.


* La théorie des nœuds étudie des objets mathématiques associés aux nœuds, les mêmes que ceux des marins ! Avec cette théorie, par exemple, on peut tenter de dessiner sur une bouée sans chevauchement de trait : c'est possible pour le plus simple des nœuds, le nœud de trèfle.

 

Puis le second groupe de lycéens est arrivé par le train, à pied de la gare : 6 autres, même profil. Beaucoup d'échanges ont eu lieu entre les deux groupes. Puis le premier groupe est reparti prendre son train vers 15h alors que le second s'est apprêté à m'écouter à nouveau... Encore un exposé à rallonge démarré sur la médaille Fields, Maryna Viazovska pour ses travaux sur les empilements denses en dimension 8 et 24. La médaille Fields est souvent vue comme l'équivalent du prix Nobel pour les matheux car elle n'existe pas dans cette discipline. J'ai donc parlé d'elle, femme Ukrainienne en poste à Lausanne, et surtout de ce qu'est un "empilement" en math. C'est, par exemple, placer des oranges sur un étal de la façon la plus compacte possible en donnant des énoncés et en donnant une preuve complète du fait que le nombre moyen de côtés des domaines de Voronoï** dans le plan est 6... comme pour l'empilement le plus dense. Il a aussi été question de calcul des géodésiques*** sur divers surfaces : cylindre, sphère, tore plat...

 

**Pour faire des maths précises sur un sujet abordé par les élèves au lycée, j'ai traité le cas de la dimension 2 : on place des pièces de monnaie sur une table de tailles différentes et on cherche à les resserrer...cela définit des régionnements du plan appelés domaines de Voronoï.

 

**Les géodésiques, c'est un autre nom donné aux plus courts chemins : dans le plan standard, ce sont des droites mais sur la Terre, par exemple, ce sont les grands cercles comme les méridiens.

 

Le second groupe est parti en mer mercredi matin 26 oct pour 3 jours : Le Crouesty, Quiberon, Houedic... et retour en BUS et train à Rennes."

 

Un  projet pédagogique unique pour encourager les filles à se tourner vers les filières scientifiques

Préparer en amont le séjour, donner confiance en eux aux élèves, progresser en mathématiques, faire découvrir l'univers maritime (métiers, environnement), apprendre à naviguer, inclure les parents dans le projet, présenter une restitution au retour, passer un bon moment sur l'eau sont autant d'objectifs visés par ce projet.  Une majorité de filles participera car :

  • elles sont moins nombreuses à choisir la spécialité Mathématiques en Première et l'abandonne plus souvent en Terminale,
  • elles pratiquent moins d'activités sportives que les garçons, notamment au lycée,
  • elles s'orientent moins vers les disciplines scientifiques et techniques.

 

Comme l'indique Sylvain : "J'ai trouvé un public passionnant, très actif en questions, conscient d'avoir beaucoup de chance de pouvoir faire cette croisière de maths et voile ! L'objectif était triple : ouvrir l'accès des maths à un public moins favorisé en trouvant un cadre extra-scolaire ; orienter en priorité vers les filles (qui avec la réforme du bac se sont un peu détournée des maths) ; connecter le lycée à l'université avec mon intervention."